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Chamanisme et modernité

chamanisme

par Paul Degryse

L’art sans limites de renaître à soi-même

La souffrance, la frustration, le manque, l’absence sont une partie essentielle de notre vie quotidienne. Si nous réfléchissons bien, nous nous apercevons que si la vie est ce qu’elle est : une dynamique, un mouvement, un changement permanent, c’est précisément à cause ou plus exactement grâce à cela, si stupéfiante soit cette affirmation !

Nous allons en permanence du manque à la satiété, de l’absence à la présence, du vide au plein. Sans manque, sans souffrance, sans frustration pourquoi bougerions-nous ? Pourquoi cet immense grouillement qu’est la vie sur terre ? Aucune raison, dans ce cas, de se mettre en mouvement, de se lever le matin, pas besoin de chercher la sécurité, de satisfaire sa faim ou son besoin d’amour ! Une immobilité totale, inconcevable, sans espace pour se mouvoir, sans temps pour changer serait la conséquence logique d’un tel état de choses, quelque chose qui ne serait pas la vie ni même la matière.

L’état de béatitude totale, décrit et promis par de nombreuses spiritualités me laissent sceptique ! La dualité et l’alternance me semblent la règle absolue même au niveau de l’esprit pur et de la transcendance.

La conquête du bonheur est notre raison de vivre, et c’est en maîtrisant cette dualité bonheur/malheur, en la dédramatisant et non en la niant que cette conquête se fait le mieux.
Le problème de la vie, bien posé n’est donc pas : Pourquoi la souffrance ? Pourquoi le manque ? Pourquoi la frustration ? Mais plutôt Comment le bien être ? Comment la satiété ? Comment l’épanouissement ?

Comment vivre au mieux cette dynamique dualiste, sachant qu’il sera naturel d’en vivre cycliquement les deux versants même si nous préférons nettement l’un des deux ?

Réussir sa vie c’est donc avoir les moyens de jouer ce jeu, d’aller du pôle – au pôle + , non pas en fuyant un état «–» jugé « anormal » pour aller vers un état « + » jugé normal mais avec la sérénité d’un coureur de montagne qui accepte le paysage tel qu’il est et en descend les ravins dans l’ombre avec autant d’attention et pourquoi pas de plaisir, qu’il montera sur les sommets et au soleil un moment plus tard.

Pour le guerrier de l’esprit, l’apprenti-chaman dont ces quelques lignes décrivent la vision du monde, la vie est un défi permanent, elle correspond à une croyance et celle-ci change profondément les choses.

Nos croyances, en effet, sont au centre du problème de la vie et du bonheur. Une grande majorité d’entre nous ne parviennent pas a être heureux tout simplement à cause de leurs croyances de base et notamment à cause de celle-ci : la vie n’est pas faite pour lutter, la souffrance, le manque, la frustration sont des choses anormales et monstrueuses. Une telle croyance non seulement, comme on peut le voir, paralyse une grande partie de notre force mais peut nous rendre malade et même nous faire mourir.

La vie est double, et surtout elle n’est pas cette image figée que figurent les mots, mais une dynamique insaisissable fondée sur la dualité et l’alternance. Cette croyance dans la monstruosité du manque et de la souffrance est assortie ensuite d’autres croyances sur le bien, le mal, le bon, le mauvais, ce qu’il faut et ce qu’il ne faut pas faire etc... et si nous ne sommes pas heureux c’est parce que nous n’avons pas d’autre alternative de croyance basique et que ces croyances sont enracinées en nous dès la naissance. Elles engendrent ensuite des sentiments qui génèrent eux-mêmes des comportements et ces comportements par lesquels nous agissons sur le monde confirment nos croyances de départ et le tour est joué ! la boucle est bouclée ! Les chamans appellent cela « l'Anneau de pouvoir » ou encore « faire le monde ». Nous fabriquons de toutes pièces un monde à nous dans lequel nous nous enfermons à double tour et rien ne peut nous en faire sortir : ni changer de pays, ni changer de travail, ni changer de partenaire amoureux, ni changer de régime alimentaire, car cette prison n’est pas au dehors de nous mais EN nous ! elle a la forme fermée d’un cercle dont les trois pôles sont : croyance → sentiments → comportements → confirmation des croyances, qui tourne et tourne avec le temps pendant que nous vieillissons dans l’amertume, les souffrances et les solutions pires que les problèmes.

Le cœur du chamanisme, philosophie de l’Energie la plus ancienne de l’humanité est de découvrir, de comprendre et de rompre cet anneau pour le remplacer par un ou plusieurs autres, plus gratifiants, plus ouverts, plus variés.

Le guerrier de l’esprit fait rimer bien-être avec Energie, Equanimité devant l’alternance souffrance/plaisir avec liberté intérieure, une liberté née de l’élaboration de ses propres croyances, une liberté fondée sur la découverte que, “faisant le monde”, il peut le faire comme il le veut, et ce que fait le guerrier de l’esprit, nous pouvons tous le faire.

On ne devient pas guerrier de l’esprit, on ne fait que découvrir qu’on l’est dejà, qu’il n’y a pas d’autre façon de bien vivre et c’est cette découverte qui fait toute la différence!

Claude Paul DEGRYSE