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La crise écologique planétaire

terre

par Paul Degryse

UNE FORMIDABLE OPPORTUNITE POUR REPRENDRE LE CHEMIN DE L’HUMANISME ET REVOIR LE SENS DE L’EXISTENCE HUMAINE

La terre est en danger.

Dans son ivresse moderniste, l’homme, pendant deux siècles, avait oublié qu’elle aussi est un être vivant et que sa santé et sa survie, dont dépendent notre propre santé et notre propre survie, sont étroitement conditionnées par un délicat équilibre entre de multiples facteurs climatiques, énergétiques et géologiques d’une complexité peut-être aussi grande que ceux qui régissent l’équilibre vital d’un corps humain.

Nous avons des raisons de nous inquiéter et fort heureusement pour nous, nos responsabilités face aux profondes perturbations qui se manifestent sur la terre ne sont pas dissimulées et chacun peut maintenant en prendre la mesure mais simultanément cette situation est bien loin d’ être seulement négative : la terre nous donne une providentielle leçon d’humilité dont nous avions bien besoin et dont nous pouvons profiter, non seulement, bien sûr , pour rectifier nos erreurs mais aussi et surtout pour reprendre en mains notre propre évolution par un prodigieux saut de conscience en avant.

Si les responsables scientifiques, sociologiques et politiques dont vous faites partie sont réellement conscients des enjeux de la situation, s’ils savent poser un regard global sur celle-ci et s’ils sont vraiment décidés à agir en faveur de la vie,, il semble que la première question qu’ils doivent se poser sera la suivante : « pourquoi en sommes-nous arrivés là ? »

Tous les êtres vivants, toutes les énergies actives sur la planète sont non seulement reliées entre eux et entre elles, mais ils sont aussi reliés au passé proche et lointain et aucun responsable planétaire actuel susceptible de prendre des décisions au nom de millions d’hommes ne peut à notre époque faire abstraction de cette globalisation spatiale et temporelle, paramètre essentiel et scientifique du fonctionnement vital de la terre .

La réponse doit dépasser le cadre purement technique et scientifique de la situation, elle doit être élaborée à partir d’un élargissement considérable de notre point de vue sur l’humanité et sur le sens de sa présence sur terre, ce n’est qu’ainsi que cette crise nous fera progresser au plan conscientiel . Le regard étroitement analytique et cartésien est dépassé et c’est même lui qui nous a aveuglé pendant plusieurs siècles.

Je vous donne un exemple pour illustrer ce propos : si un enfant trébuche en marchant sur un trottoir et se fracture le genou, on peut décider, comme solution, après l’avoir soigné, qu’il faut remettre à sa place le pavé qui dépassait, ou encore qu’il faut changer l’épaisseur des semelles de ses chaussures que l’on suppose trop épaisses, mais on peut aussi en profiter pour lui enseigner l’intérêt d’être plus attentif en toutes occasions. Il y a une différence profonde entre les deux premières solutions et la troisième : avec les deux premières , nous faisons évoluer le trottoir ou les chaussures, avec la troisième , nous faisons évoluer l’enfant, nous le rendons plus responsable de ses actes, le vrai progrès c’est cela Dans les deux premiers cas, l’enfant n’aura pas profité de la leçon et d’autres mésaventures seront la conséquence de son inattention persistante .

Considérer la situation critique de l’humanité sur la terre et sa responsabilité dans celle-ci sans remettre en question le sens qu’elle veut donner à son existence et sans envisager un changement de choix philosophiques pour l’avenir ce serait exactement comme de choisir les deux premières solutions en ignorant totalement la troisième , dans le cas de l’exemple précédent.

De nombreux philosophes et sociologues ont, depuis de nombreuses décennies clairement insisté, dans leurs analyses de la société moderne, sur le fait que notre civilisation a fait beaucoup évoluer la technologie, fille de la science, mais que par l’assistanat généralisé qu’elle implique, elle est loin d’avoir fait évoluer l’homme lui-même, l’homme ordinaire, l’homme de la masse qui représente 95 % de la population.

Le niveau de l’intelligence humaine ne peut plus être mesuré à la capacité de mémoriser d’innombrables codes et procédures techniques et mécaniques que nécessitent maintenant le moindre geste professionnel ou le moindre acte de la vie privée , mais bien plutôt dans la capacité de réflexion personnelle et de créativité individuelle que peut démontrer un individu face aux imprévus multiples de la vie quotidienne..

Si l’on considère l’homme, à partir point de vue darwinien , comme l’aboutissement d’une succession de règnes allant du monde minéral à lui-même en passant par le règne végétal et le règne animal , on ne peut qu’être émerveillé par cette grandiose évolution de la vie sur terre mais en même temps, face à l’immense gâchis qu’est le massacre de la vie auquel se livre l’homme depuis quelques générations , on ne peut que s’exclamer :
« N’aurions-nous reçu ce niveau de conscience qui , par nos productions artistiques, philosophiques et spirituelles, nous distingue si nettement du règne animal, que pour nous anéantir nous –mêmes à peine sortis de celui-ci , par l’effet d’un orgueil immense suscité précisément par la contemplation narcissiste de notre créativité ? »

Un flot de suffisance qui nous aurait aveuglé au point de nous couper des autres règnes et de nous croire capables d’exploiter et de détruire impitoyablement ces « règnes-ancêtres » sans être nous-mêmes le moins du monde atteints par ces destructions ?

Ces millénaires de sagesse philosophique ou spirituelle avaient-ils de telles carences cognitives ou leur trésors ont-ils été subitement et totalement oubliés ? Que s’est-il donc passé brusquement en l’espace d’à peine deux siècles qui menace maintenant de mort le fruit de plusieurs milliards d’années d’évolution vers la vie et la conscience ?
La réponse est simple, terrible dans sa simplicité mais pas facile à accepter :

L’homme est, comme l’univers ou la terre, une globalité, : il est fait de trois parties, qui, lorsqu’elles fonctionnent interactivement, en éveillent une quatrième : l’âme.

Il y a de l’intelligence et de la connaissance dans les quatres parties, ce que l’intellect décide ,le cœur doit le ressentir, ce que le cœur désire, l’intellect doit le valider, ce que le corps sait, les deux autres doivent l’écouter, mais surtout l’intellect, le cœur et le corps doivent savoir se taire un moment pour que l’’homme entende son âme s’exprimer.

Or, voici à peine trois siècles, tout à coup, l’homme s’est mis à fonctionner majoritairement à partir de son intellect,et , émerveillé des discours de celui-ci, il a cessé d’écouter son cœur, son corps et son âme, échafaudant de nouvelles croyances qui prirent bientôt la place et le rôle des religions et deux d’entre elles se distinguèrent particulièrement pour bientôt s’associer : le scientisme et l’économisme.
Comprenons-nous bien : le scientisme n’est pas la science, mais une foi fanatique et sans réserve dans la capacité qu’aurait la science de résoudre tous les problèmes de l’homme et de le rendre parfaitement heureux.
De même l’économisme n’est pas l’économie, mais une foi fanatique dans l’idée que c’est la circulation de l’argent la production et l’appropriation de biens matériels qu’il permet qui serait un facteur essentiel du fonctionnement harmonieux de la société et du bien-être des personnes.. L’ensemble de ces deux systèmes réunis constitue le matérialisme, qui régit sans partage la société occidentale actuelle et de plus en plus la totalité des cultures de la planète.

Ce mode de fonctionnement est aussi une idéologie et ses partisans convaincus, hommes politiques, idéologues professionnels, économistes et industriels, ceux qui en sont les acteurs délibérés doivent s’autojustifier et s’autovalider en permanence et pour cela ils ont aussi le pouvoir sur tous les médias qui imprègnent par tous les moyens, possibles, y compris le mensonge, la manipulation mentale, l’intoxication émotionnelle voire l’intimidation, l’esprit des masses afin qu’elles ne puissent prendre la mesure des effets inquiétants et mortifères de ce système social.

En fait, le matérialisme, pour la masse des êtres humains , consiste à nourrir l’ énorme machine techno-économiste en produisant toujours plus pour consommer toujours plus, car cette machine fonctionnant elle-même de façon dualiste et compétitive, est condamnée à une inflation consuméro-productiviste permanente qui dévore la conscience des êtres humains en les maintenant sous l’hypnose de l’avidité matérielle et de la peur du non-emploi.

Le règne humain est encore dans son adolescence . Les religions pas plus que le matérialisme ne lui ont permis de mûrir parceque le sens du mot « liberté » a toujours été manipulé sémantiquement par les créateurs de la plupart des religions et encore plus par les idéologues et leaders du matérialisme.
La liberté, en effet, est la véritable clé de la maturation du genre humain, la liberté ne peut surgir que du dedans de chaque individu, elle est une énergie centrifuge C’est de lui-même, avant tout, que l’être humain doit se libérer, de son attachement, et même si beaucoup de religions, notamment certaines, ne laissent pas beaucoup de place à la spontanéité de chaque conscience pour que la liberté fleurisse en lui, le matérialisme est encore bien pire, car institutionnalisant le culte de la possession de biens matériels et le mercantilisme généralisé, il ramène l’homme à sa nature la plus primitive et animale et à la phase infantile de la croissance du bébé. qui porte tout à sa bouche pour tout avaler.

Comment l’humanité peut-elle profiter de la crise écologique planétaire pour faire un nouveau bon évolutif en avant ?

Les signataires de ce document pensent que le rapport social dominant/dominé qui caractérise toutes les sociétés y compris les démocraties où ce rapport ne semble atténué que par la manipulation intellectuelle permanente des personnes , doit totalement évoluer et que c’est seulement ce changement qui pourra sauver la terre, car les profonds changements comportementaux que va nécessiter l’abandon du matérialisme ne vont pouvoir se mettre en place dans le délai nécessaire que par la volonté spontanée des individus.

Mais Combien de personnes sont prêtes actuellement sur terre, à abandonner leur mode de vie consuméro-productiviste, même si celui-ci ne les rend pas du tout heureux ?

Très peu ! car la majorité d’entre eux ne peuvent pas croire que l’on puisse vivre autrement, ils sont conditionnés comme cela depuis plusieurs générations, ils ont été nourris dès la naissance avec ce discours et si le coup de frein vient d’en haut, d’énormes révoltes auront lieu, il faut donc simultanément engager un travail à partir du dedans, leur faire découvrir un nouveau mode de vie qui s’adresse autant à leur intellect qu’à leur cœur et qu’à leur corps ,pour qu’ils deviennent eux-mêmes les acteurs du changement planétaire, pour que cette crise soit l’occasion d’un prodigieux bond évolutif pour l’espèce humaine et ce changement c’est le travail sur soi.

Qu’est-ce que le travail sur soi ?

Cela commence par l’acceptation de l’idée que chaque individu peut améliorer considérablement tous les aspects de sa vie en apprenant à mieux se connaître lui-même puis en travaillant du dedans ses propres caractéristiques et fonctionnements psychiques , émotionnels et corporels.
Le travail sur soi ne peut s’engager qu’à partir de la foi dans cette idée, c’en est un aspect essentiel et sa condition première est l’humilité (encore une foi), un paradoxe puisqu’il faut aussi nourrir l’ambition du bien-être en même temps que celle du progrès personnel et intérieur, afin de produire une plus grande autonomie mentale .

On peut dire évidemment que le travail sur soi, engagé dans ces conditions, est un travail libérateur qui permet une ouverture de conscience de l’individu n’ayant aucune commune mesure avec un quelconque enseignement octroyé de l’extérieur dans un cadre officiel et institutionnalisé.
Mais surtout c’est une démarche qui permet à chaque individu de retrouver le juste équilibre entre ses besoins purement matériels et ses besoins plus subtils et c’est justement de cette prise de conscience , réalisée massivement mais par chacun, spontanément et du dedans, ,dont nous avons un urgent besoin pour mettre en place le système de la sobriété heureuse qui permettra de surmonter la crise planétaire en ramenant notre productivisme frénétique à des proportions raisonnables, saines et compatibles avec le respect de la santé de la terre.

Peut-être, Monsieur le Président, penserez-vous que c’est là une solution bien utopique et quelque peu éloignée du problème car en temps qu’homme moderne vous raisonnez en pensant qu’à un problème écologique il faut une solution écologique mais je vous l’ai dit au début de cette déclaration, les causes de notre situation actuelle ne sont industrielles que dans la phase ultime de la chaîne des causes et effets qui ont abouti à celle-ci, vous le savez ,on ne supprime les mauvaises herbes qu’en les déracinant , non en les coupant au ras du sol, de même dans cette situation grave, il faut aller plus profond que le « ras du sol » et percevoir que les causes sont humaines, sociologiques et même psychosociologiques .

La plus importante de ces causes est l’état d’immaturité généralisée d’une humanité qui vit encore, partout sur la planète, à un niveau d’irresponsabilité psychique dû à son organisation sociale millénaire dominant/ dominé , s’apparentant plus au fonctionnement social du règne animal qu’à un niveau de conscience prétendûment « humaniste » de notre’ évolution ..
Ce système , en effet, maintient l’immense majorité de la population terrestre dans un état de passivité intellectuelle entretetenue par le « prêt-à-penser » éducationnel.

Nous ne résoudrons pas cette crise planétaire sans changer profondément notre philosophie du fonctionnement collectif des hommes et, par là, le sens que nous donnons à la vie et à la conscience. Profitons-en…. C’est une occasion rêvée pour donner enfin un vrai sens au mot « liberté » si galvaudé depuis des millénaires…

Ne sont-ce pas des utopies raisonnables qui ont toujours fait évoluer l’ humanité ? Et si nous acceptons de concevoir que cette évolution est loin d’être achevée, pourquoi ne pas avoir l’ambition, à la mesure de cette humilité, de la prendre en mains ?

Quand les premiers hominiens se sont dressés sur leurs membres arrières pour libérer leurs mains, peut-être cela fut-il la réponse à une menace d’extinction liée à la force prédatrice d’une autre espèce vivante de leur voisinage , et peut-être certains d’entre eux, confondus par cette audace et cette nouveauté, ont-ils pensés qu’un tel mode de locomotion était impossible et utopique et cependant quel bond en avant cela a-t-il permis !
Aujourd’hui , l’utopie du travail sur soi généralisé se présente comme une solution audacieuse pour résoudre la crise de géophobie que nous vivons, elle peut déclencher un autre bond en avant pour les êtres humains qui auront su profiter de leurs erreurs pour s’engager, cette fois consciemment dans une nouvelle spire de l’aventure terrestre, ce sera sans doute l’évènement le plus prodigieux de l’histoire humaine depuis l’adoption de la posture verticale.

Après la libération des mains voici venu le temps de la libération du cerveau, pour passer peut-être à un nouveau règne de la vie sur terre.

Paul Degryse