meditationfrance, méditation, tantra, connaissance de soi
Les archives de Meditationfrance

Vipassana, la voie de la pleine conscience

Dominique Vincent

Par Dominique Vincent, animateur de séminaires de développement personnel et praticien en psychothérapie relationnelle

Vipassana est la quintessence de toutes les méditations selon l'enseignement originel de Bouddha

Cette article est un résumé d’un texte plus développé sur la méditation Vipassana mise en perspective avec plusieurs approches actuelles qui en sont issues, Pleine conscience selon Jon Kabhat Zinn, Thich Nhat Hanh, retraites dans la lignée de Goenka, Osho, et ce que je pratique et enseigne moi-même.

Je crois que la pratique de Vipassana, une méthode vieille de vingt cinq siècles, peut vous mener au bonheur. Je crois aussi qu’elle est une réponse adaptée aux désordres du monde actuel. Seule notre paix intérieure et notre joie de vivre peut véritablement aider ceux qui souffrent et cherchent la lumière.

Vipassana est une approche Bouddhiste qui est remise à l’honneur aujourd’hui avec l’intention de la faire accepter dans les milieux laïques sous le nom de ‘Mindfullness’ en anglais, soit ‘Pleine Conscience’ en français, ce qui est une traduction exacte de Vipassana. Le biologiste américain, Jon Kabhat Zinn, est un des principaux acteurs de cette remise à jour. Il a réussi à faire accepter la méditation dans les centres de soins psychiatriques et, par ricochet, dans de nombreuses sphères où la méditation étaient incomprises et rencontraient beaucoup de résistances. Je fais le choix de resituer la recherche de pleine conscience dans son contexte originel empreint du sens du sacré et de la compassion.

Vipassana, en Pâli la langue de Bouddha, signifie prise de conscience de la nature de la réalité, la claire conscience de ce qui arrive au moment même où cela arrive. Le processus, pour parvenir à cet état, est de cultiver la présence à tout ce qui surgit dans le champ de votre conscience. Cette présence à la source de votre être, vous remplit de joie et de créativité. Bien sûr, ce résultat n’est pas acquis immédiatement. Le processus passe par des moments difficiles dus à la résurgence et au nettoyage de conflits intérieurs. Une bonne dose de volonté et de persévérance est nécessaire mais le jeu en vaut la chandelle.

Dans son essence, Vipassana est une méthode d'observation. Elle consiste à constater, sans aucune intention de le modifier, ce qui survient dans le champ de la conscience. Elle est "l’art de la contemplation équanime (C’est à dire sereine par rapport à tout ce qui surgit, sans choix ni rejet.), qui consiste non pas à maintenir sa concentration sur un objet déterminé, mais à laisser l’attention se poser librement sur tout phénomène qui appelle sa lumière." Goenka

Prendre conscience et accepter les bras grands ouverts la totalité de l'expérience humaine
L’observation et l’acceptation à laquelle nous invite Vipassana demande un effort sans effort qui aboutit à la relaxation la plus profonde qu'un être humain puisse connaître. Elle est loin d'une attitude passive car la nature de l'expérience humaine consciente est d'être un surgissement continuel de la double réalité intérieure et extérieure. Un des paradoxes de cette approche est qu'elle s'est développée principalement dans un milieu monastique dominé par les hommes avec des vœux de renonciation. Cela signifie la mise de côté d'aspects essentiels de l'expérience humaine tels que la relation amoureuse et la sexualité. Le risque est de limiter l'intention première de Vipassana qui est résolument intégrative. Mais un courant caché aux yeux de tous, souvent transmis par des femmes, a perduré loin des ordres monastiques. Dans ce courant qui met en valeur l'énergie féminine, la sexualité, et les plaisirs de la vie autant que la souffrance, la maladie et la mort, Vipassana rencontre le Tantra hindouiste. Cela a donné naissance au Bouddhisme tantrique. La question continue de se poser à nous: la voie de la méditation est-elle ouverte également à tous dans la vie ordinaire ou faut-il se retirer dans un monastère pour avoir tout loisir de pratiquer?

Au jour le jour, nous faisons l’expérience de joies et de peines, d’espoirs et de déceptions, de conflits et d’amours. Bien sûr, il est plus facile de maintenir une attention constante dans une vie monastique que dans une vie "ordinaire" avec une profession, un divorce, des difficultés de garde d’enfants, des soucis d'argent... Par contre, cette vie ordinaire présente des occasions d'observation et de prises de conscience beaucoup plus riches et intenses et mène vers une vie d'abondance et de partage très différente de l’expérience monastique que j’ai moi-même expérimentée pendant six ans.

Vipassana est une démarche intégrative de tous les niveaux de l'expérience intérieure et extérieure, sensations, émotions et intellect. Vous êtes invités à ouvrir tous vos sens, à vivre toutes vos émotions, à développer le meilleur de votre intelligence et de votre créativité. Le calme mental sera un des résultats, un des effets de cette conscience intégrative. Vipassana considère les sensations et les ressentis comme les objets les plus fondamentaux de l’observation.

Dès les origines de la méthode, Bouddha affirme qu'il y une relation étroite de cause à effet entre l'écoute attentive des sensations et l'éveil, le Nirvana, le bonheur absolu au travers et au-delà des contingences de notre vie. Il affirme que cette écoute est la cause la plus déterminante pour conduire à l'éveil. Quand je suis attentif à mes sensations, je ne suis, ni dans le passé, ni dans le futur, je suis dans l'immédiateté de l'expérience, dans le présent. Plus je développe cette attention, plus je suis proche du cœur de ma réalité qui est d'être conscient, d'être la conscience. Cette affirmation est confirmée par les thérapies actuelles psycho-corporelles et trans-personnelles.

Une difficulté majeure serait que vous débutiez votre chemin de méditation par Vipassana sans avoir reconnu et accepté que vous êtes, comme tout être humain, habité de pulsions sexuelles et agressives. La tendance serait alors d’utiliser votre temps de méditation pour les occulter encore d’avantage. Il me semble nécessaire que les premiers pas se fassent sous la supervision de quelqu’un conscient des risques de refoulements et de désordres psychologiques qui peuvent découler de pratiques méditatives. Méditation, développement personnel et psychothérapie devraient se donner la main.

Mon expérience personnelle
Je me souviens de mon premier séjour en Inde. Tous les matins à l’Ashram du Maître Osho, il y avait à 11h le choix entre deux méditations, des danses soufies sous un préau, et Vipassana sur une terrasse qui surplombait ce préau. J’avais beaucoup de plaisir à participer à la danse. Un matin, j’ai eu envie de tester Vipassana. Ce fut terrible! J’entendais en-dessous les percussions qui rythmaient la danse. Les jambes me démangeaient et cette heure fut une véritable torture. Par contre, trois mois plus tard et après plusieurs groupes de développement personnel, j’ai eu envie de retourner faire quelques séances Vipassana au même endroit. Des moments de pur bonheur ! J’avais mûri en ramenant mon corps à la vie avec les sensations et les émotions dont j’avais perdu le contact. Je n’étais plus assis sur un volcan prêt à entrer en éruption.

Cinq ou six ans plus tard, alors que je pratiquais surtout les méditations actives d’Osho, j’ai décidé de participer à une retraite Vipassana de 21 jours. Ce fut extrêmement douloureux. En plus des malaises physiques dus à l’assise immobile pendant de longues heures, j’ai surtout été le témoin de pensées angoissantes et d’émotions pénibles, auto-jugements, peur des autres, moments de panique intense. Cette expérience m’a placé devant l’évidence qu’il me fallait visiter la source de mes angoisses. Elle pouvait bien se trouver dans mon enfance. Donc, je me suis inscrit à un groupe de thérapie primale de cinq semaines. Ce fut l’un des grands moments de ma vie. J’ai crié, pleuré toutes les larmes de mon corps, compris et accueilli l’enfant en moi, revisité les troubles de l’adolescent, les croyances qui se sont formées en moi et qui ont été si déterminantes pour mon histoire de vie…

Dix ans plus tard, je suis tombé sur une annonce : « The ultimate retreat », l’ultime retraite. Une retraite Vipassana de 21 jours en isolation totale. Ce furent des moments de grande satisfaction et de paix profonde. Enfin, seul avec soi-même, loin des demandes pressantes de mon amie, de mes clients ! J’ai fait de nombreuses constatations parfois étonnantes. Par exemple, pour moi qui suis une bonne fourchette, le contentement intérieur me nourrissait et je n’ai presque rien mangé. Après quelques bouchées, je commençais à avoir des spasmes à l’estomac. Malgré cela, j’avais la certitude que tout allait bien et, de fait, dès la fin des 21 jours, tout est rentré dans l’ordre. Les centres d’énergie qu’on appelle les Chakras se sont manifestés de façon évidente, parfois avec une puissance extrême. Les pensées me sont apparues comme des phénomènes périphériques, comme si j’étais un scaphandrier et qu’elles passaient autour de moi comme des poissons.

Je suis sorti de cette retraite posé, conscient de mes fonctionnements intérieurs comme jamais auparavant, avec une solide confiance en moi. Le plus étonnant a été, pendant quelques heures, la différence de rythme entre mon fonctionnement et le monde extérieur. Tout allait si vite alors que je ne pouvais marcher et parler que très lentement. Tout est rentré dans l’ordre dès le lendemain.

Une des conclusions que je tire de cette retraite, c’est la nécessité de savoir la faire au bon moment et dans les meilleures conditions. Le bon moment, quand le niveau d’angoisse est descendu à un niveau acceptable, ce qui pour moi a été la conséquence d’années de thérapie et de méditations actives. La condition extérieure optimale est un environnement de personnes aimantes et bienveillantes qui connaissent bien ce processus.

Venons-en à la pratique de Vipassana
Voici maintenant les différentes étapes de la pratique de Vipassana que j’enseigne : la préparation, l’assise, la pleine conscience au quotidien.

La posture
Installez-vous le plus confortablement possible, le dos bien droit, si possible sans vous appuyer sur un quelconque dossier. Prenez conscience des points de contact avec le sol. Les reins doivent être légèrement cambrés, la nuque étirée, le menton rentré. Vous gardez l'immobilité la plus complète possible en résistant aux inconforts qui en résultent. Bien sûr, vous tenez compte de vos limites physiques réelles telles qu'une hernie discale ou un genou blessé.

Vipassana

La respiration du début
C'est une phase importante pour calmer l'agitation mentale et rendre possible une méditation assise prolongée.
• Portez votre attention pendant quelques minutes à l'orifice des narines. Vous y percevez le courant de l'air qui entre et qui provoque une sensation de fraîcheur, et le courant de l’air qui sort qui ramène à la sensation de la température du corps.
• Suivez consciemment le parcours de l'air depuis les narines jusqu'au fond de la gorge, toujours en vous aidant avec la sensation de fraîcheur lors de l'inspiration.
• Écoutez le son que fait dans votre tête l'inspiration et l'expiration. Constatez que le son est légèrement différent à l'inspiration et à l'expiration.
• Concentrez-vous sur la zone de fraîcheur au fond de la gorge.
• De là, passez à la perception de la poitrine qui s'élève et s'abaisse à chaque respiration. Si c'est difficile à percevoir, amplifiez légèrement l'inspiration.
• Sentez que le ventre est impliqué lui aussi dans le mouvement perçu dans la poitrine. Il ne fait qu'un avec elle. Le moment vient où vous allez percevoir votre ventre respirer tout seul comme une vague qui s’élève et retombe, mouvement profond et rassurant, nourrissant, chaleureux. Vous ne respirez plus, vous êtes respiré. La vie vous respire et vous berce continuellement. Vous pouvez rester une longue période de temps à sentir et à savourer la sensation de la respiration dans tout l'espace du tronc et de l'abdomen.

Méditation Vipassana assise.
"Faites l'expérience de la réalité, celle du monde extérieur comme celle de votre monde intérieur, telle qu'elle est et non telle que vous voudriez qu'elle soit." Sattva.

Immobilisez-vous totalement en maintenant le focus central sur la vague de la respiration qui anime l'abdomen tout en gardant une conscience périphérique du corps entier et de tout ce qui peut l'affecter, sensations, émotions et pensées. Vous ne vous attachez à rien de ce qui survient, mais vous ne luttez pas non plus pour en ralentir ou en bloquer le surgissement.

Avec de la persévérance, vous constaterez que l'agitation physique, émotionnelle et mentale tend à se calmer. Commencez par des séances courtes, dix à vingt minutes suffisent les premières semaines. Plus que la durée, ce sont les bénéfices immédiats que vous en retirez qui importent. Vous pouvez savourer les premiers effets de la méditation alors que le corps, en particulier le dos et les genoux, s'habitue tranquillement à la position. Une fois que le mental apprécie de se reposer, augmentez la durée des séances. Cinquante minutes, c’est largement suffisant.

Si vous émettez le moindre jugement intérieur envers ce qui surgit, certains aspects de votre vie affective et émotionnelle vont être refoulés dans l'inconscient et y demeurer cachés jusqu'à ce qu'un événement extérieur déclenche une réaction perturbatrice. Pour éviter cet écueil, le Maître Osho recommande des méditations actives comportant une phase de catharsis en complément des méditations assises.

Pour terminer, offrez votre état de méditation pour soulager la souffrance et inviter à la célébration de la vie
Vous êtes pouvez offrir les bienfaits de votre pratique au monde. Vous vous sentez reposé, paisible, joyeux. Visualisez que cela se répand comme des ondes autour de vous et affecte positivement votre entourage. Vous pouvez aussi diriger intentionnellement ces ondes vers des personnes ou des lieux précis qui en ont particulièrement besoin, un ami malade, un pays en guerre…

Vipassana au cœur du quotidien
Vous avez fait l'effort de méditer chez vous dans votre chambre, ou de participer à une retraite prolongée dans un groupe de pratiquants. Maintenant, il faudrait que cela imprègne et transforme votre vie quotidienne, la manière dont vous vivez votre monde intérieur et dont vous entrez en relation ! Comment ? De nouveau, utilisez votre compréhension et votre vécu des trois niveaux, le corps et les sensations, les émotions, le mental et son contenu, les pensées et les images.

En toute situation, demeurez à l'affut du plus simple, les multiples sensations qui sont toujours là et qui attendent votre attention pour s'épanouir pleinement et vous livrer leur potentiel d'humanité et de bonheur. - Deuxièmement, soyez attentif aux moindres mouvements d'humeur et d'émotions qui fluctuent en permanence. - Enfin, suivez le fil de votre activité mentale, le discours intérieur qui semble ne jamais vouloir s'arrêter. Le bénéfice que vous en retirerez est énorme: prise de recul, dés-identification d’avec le contenu de votre mental et perception immédiate de qui vous êtes vraiment.

Pour conclure
Apprendre Vipassana n'est pas qu'apprendre une méthode, c'est avant tout une transmission d'enseignant à élève, voire de maître à disciple, d'une qualité, d'un parfum qui émane de quelqu'un qui est calme, paisible, intégré. Rencontrer une telle personne, paisible et silencieuse en même temps qu'animée d'une vitalité intense et vibrante, peut déclencher en nous une soif ardente, une aspiration à en trouver la source. Je remercie chaque jour mon maître Osho auprès de qui j'ai ressenti la grandeur, l'immensité et la beauté de notre véritable nature. Merci à lui de m'avoir indiqué le chemin de Vipassana et des innombrables moyens complémentaires qui m'accompagnent au quotidien jusqu'à ce jour.

Le plus grand des secrets de Vipassana se trouve caché au fond de notre cœur. Les enseignants, qu'ils soient eux-mêmes sur le chemin de la réalisation, ou qu'ils soient pleinement réalisés, peuvent nous donner envie de nous diriger vers la porte du cœur. Ils peuvent nous apprendre à marcher, ils peuvent nous donner la clé, mais il reste que c'est à chacun d'entre nous qu'il revient de persévérer sur ce chemin et d'ouvrir largement notre propre cœur. Il faut beaucoup de courage et d’amour pour soi pour s’engager sur ce chemin. La récompense est inimaginable.

Lire l’article complet ici dans notre rubrique Dossiers d’actualité.

Dominique et Marie-Anne sa compagne offrent régulièrement des séminaires de méditation.
Voir les dates et leur site sur Meditationfrance ici.

Méditation, l’art de l’extase intérieure
Un mini festival de méditations. Nous vous ferons découvrir et pratiquer des voies méditatives qui passent par la musique, la danse, le chant, l’expérience du corps énergétique, des visualisations, le mouvement… Et bien sûr les méditations assises telles que Vipassana et Zazen.
Nous désirons promouvoir une pratique de la méditation qui soit profonde, joyeuse, remplie d’amour et de compassion. Comme nous le dit le Maître Osho, le seul espoir de ce monde se trouve dans notre niveau de conscience et dans l’intensité et l’authenticité de nos rires, de nos pleurs, de nos danses, de notre célébration de la vie.

NB : Le nom de notre séminaire de méditation est inspiré par le titre d’une compilation de discours du Maître Osho : Meditation, the Art of inner ecstasy. Un de nos livres de référence sur la méditation.