Les archives de Meditationfrance
La Cohérence
Extrait du livre "Oser s’accomplir, 12 clés pour être soi", par Marie-Pierre Dillenseger
publié chez Mama Éditions
Les personnes et les organisations intègres sont entièrement elles-mêmes. Aucun aspect du soi n’est différent ou séparé. Au centre se trouve la clarté, pas le conflit.
Margaret Wheatley
La méditation fait rentrer l’ensemble du système nerveux dans un champ de cohérence.
Deepak Chopra
Marie-Pierre Dillenseger est praticienne des arts chinois consacrés aux forces spatiales et temporelles, autrice et conférencière. Son objectif est l’économie des forces individuelles et le renforcement de la vitalité des personnes et des projets qu’elle accompagne au quotidien. L’une de ses spécialités est la levée des secrets et la mise au jour des loyautés invisibles. Elle est basée aux États-Unis et sa clientèle est internationale.
En 2019, elle publie chez Mama Éditions Oser s’accomplir, 12 clés pour être soi, dont voici un extrait qui présente le premier concept, la première posture clé, associée à la vitalité : la cohérence.
« La mise en cohérence de notre manière de vivre avec notre être profond réveille et décuple nos capacités. L’absence de cohérence émiette la force de frappe, fragilise la connexion à soi et désintègre l’âme.
Pascale suit son conjoint à l’étranger, mais « son cœur n’y est pas ». Rachel est appréciée dans un département de radiologie réputé, mais « travailler au sous-sol la tue ». (…). Tristesse, découragement et manque d’entrain sont d’excellents révélateurs d’incohérence. Comme le sont les lapsus et les actes manqués. Mary est contrainte d’intégrer « un jeune arriviste » dans son service. Elle s’est exprimée, sans effet, auprès de sa hiérarchie. Elle glisse sur le parking de l’entreprise et se fracture l’épaule. Son corps prend le relais d’une parole inefficace.
Un être en cohérence est à la fois « rassemblé et entier ». Les actes sont en phase avec la parole et les pieds suivent la tête. La personne fait ce qu’elle dit. Elle connaît et assume ses valeurs. Le terme signifie « être attaché ensemble, qui se tient, en général de manière logique ». L’apprentissage de la cohérence se fait très tôt dans la vie, stimulé par la fiabilité d’un adulte attentif et les jeux d’assemblage où l’on emboîte des formes géométriques, apparie les « sept familles » ou trouve l’erreur dans un dessin.
La cohérence s’installe quand le corps et la tête communiquent, quand le cœur, l’âme et l’esprit se rejoignent, quand toutes les parties d’un tout sont au diapason. Lorsque l’ensemble des muscles, des équipes ou des citoyens tendent vers un objectif clair, la synergie est maximale et la force de frappe renforcée. Dans le cas contraire surviennent la méfiance en amitié, la dissonance en musique, la discorde en politique, la dispersion en économie, l’inefficacité en entreprise et le gâchis dans la grande distribution. Le manque de cohérence crée des fuites énergétiques. Selon le domaine, ces pertes se mesurent en doutes, en euros, en kilos, en personnel, en graines et en pourriture. Globalement, celles-ci affectent le niveau de vitalité de l’organisme considéré. (…)
Qu’il s’agisse d’un système ou d’une machine, l’absence de cohérence se manifeste par un dysfonctionnement : un climatiseur qui souffle de l’air chaud au lieu de refroidir la pièce, un médicament qui tue au lieu de guérir, une institution caritative qui détourne de l’argent. Tel un caillou dans la chaussure, le dysfonctionnement attire à lui des forces qui ne lui sont pas destinées, rendant moins performante la bonne marche des choses. Il peut s’agir d’un parent qui réclame une visite et qui, systématiquement, est souffrant lors de votre séjour ; un ami qui s’autorise une critique blessante au nom du « bien qu’il vous veut » ; un organisme dont les actes contredisent les valeurs. La réalité se trouve en décalage avec l’intention affichée, créant malaise, perplexité et parfois blessure. Intentionnelle ou pas, consciente ou non, l’incohérence est source de désorientation chez qui la côtoie. Elle brouille les pistes et ralentit ceux qu’elle rencontre. L’incohérence est une force d’inertie qui ne dit pas son nom.
L’inverse, un excès de cohérence, mène à l’uniformité, à la monotonie, à la conformité et potentiellement à la dictature. La cohérence extrême est aussi problématique que son contraire. C’est en son nom que les vêtements de Sophie étaient toujours assortis à ceux de sa mère et qu’une divergence d’opinions est systématiquement censurée dans la famille de Dominique. De telles exigences retardent le moment où la personne peut assumer la légitimité de sa différence. (…). L’exigence de conformité vient alors alimenter des forces d’émancipation – ou de rébellion – ultérieure comme un feu qui couve sous la cendre.
Les dangers du manque de cohérence, distincts de l’incohérence avérée, sont plus discrets et plus sournois. La partie manquante ou « en dysfonctionnement » n’est pas forcément visible ni facile à identifier. C’est le conjoint de Claire, toujours charmant en société, mais hypercritique dès que les amis repartent ou un individu « bien sous tous rapports » qui tourmente un animal lorsqu’il est seul chez lui. Le maillon problématique n’est pas forcément mécanique. C’est un regard en coin, un silence, un oubli non innocent qui créent une ambiance vaguement déplaisante, une atmosphère un rien délétère, une perte d’énergie inexpliquée. Tous les garagistes connaissent la difficulté à identifier la pièce qui épisodiquement bloque, clapote et râtelle le moteur. Mais lorsque le grain de sable est immatériel, la difficulté est décuplée. Quelqu’un qui pique dans la caisse finit en général par être pris, mais quelqu’un qui pique la vitalité des autres est moins facile à identifier. (…)
L’arrivée d’un nouveau dirigeant au sein d’une entreprise n’est pas seulement l’arrivée d’un curriculum vitæ, combinant expérience et compétences, c’est aussi l’arrivée d’une nouvelle énergie. Celle-ci a son degré de cohérence plus ou moins grand avec les équipes et les pratiques déjà en place. S’ensuivent inévitablement une mobilisation et un rassemblement des forces ou une démoralisation et une hémorragie de talents. Un changement de politique environnementale, une réforme, une réhabilitation d’immeuble ou de quartier ont le même effet. Plus le degré de cohérence est grand, plus les décisions et les mesures proposées s’inscriront dans la durée. Plus le dynamisme et la vitalité viendront irriguer le pays, l’immeuble ou le quartier. Moins les gens prendront la poudre d’escampette et moins les rats quitteront le navire.
Au niveau individuel, faire tous les jours une activité qui n’est pas en phase avec sa conscience draine les forces. Vivre avec quelqu’un qui ne vous comprend pas, ne vous entend pas, ne vous écoute pas, épuise. Manger ce qui ne vous convient pas rend malade, littéralement. Vivre à Paris alors que votre nature a besoin d’un air sec sape le moral. Et l’on peut dorénavant affirmer que « de nombreux symptômes et maladies sont affectés par nos pensées, nos émotions et nos comportements ».
Comment identifier cette part de nous-mêmes qui est atrophiée, déboussolée et fragilisée par un entourage en manque de cohérence ? Est-ce quelque chose que nous apprenons à l’école ? En famille ? Pas forcément.
Une étude publiée par la Harvard Business Review conclut que « les rats peuvent être plus intelligents que les humains quand il s’agit d’intégrer de nombreux facteurs et de les relier au jugement et à l’intuition ». Les rats perdent moins de temps que les humains à chercher une règle qui n’existe pas et à rationaliser une situation qui leur est défavorable. Quand leur survie est en jeu, ils prennent la clé des champs plus rapidement que nous.
Lorsque la culture de la conscience à soi, distincte de la conscience de soi, n’est pas inculquée par l’éducation ou par un adulte bienveillant, cet apprentissage tend à s’imposer par le biais d’une maladie, d’un évènement ou d’une expérience douloureuse. À quelques jours d’un voyage important m’était venue l’idée de déplacer, seule, des meubles. L’initiative s’est soldée par la chute d’un banc lourd sur mon pied. Il a fallu la douleur, puis la remarque d’un interne au service des urgences, pour que je réalise mon décalage avec la réalité. Alors que je lui expliquais que je devais « être sur pied dans trois jours pour prendre un avion », il m’a regardée droit dans les yeux et m’a très sérieusement répondu : « Madame, nous ne sommes pas dans un hôpital psychiatrique ici ! » En d’autres termes, j’étais en incohérence avec mon état. Son humour m’a remis de l’ordre dans les idées. J’ai annulé le voyage et remercié mon pied blessé. Le message était bien sûr de « lever le pied ».
Est-il possible d’être en cohérence, sur tous les plans, tout le temps ? À quel aulne se mesure la cohérence ? Est-ce avec soi-même ? Est-ce avec un système social, familial ou poli- tique ? Avec ses expériences passées ou avec son ambition future ? Sa couleur de peau, sa taille ? Sa force, sa faiblesse ?
Un professeur de Qigong qui s’éclipse tous les quarts d’heure pour fumer une cigarette, un défenseur des droits de l’Homme qui maltraite sa femme, une personne diabétique qui boit des sodas sont-ils incohérents ? Officiellement, non. Mais dans la mesure où leurs actes, leurs fonctions et leurs habitudes ne sont pas connectés, attachés, la réponse est oui : le Qigong est une pratique de santé, la déclaration des droits de l’Homme est unisexe, les boissons sucrées sont contre-indiquées en cas de diabète.
Épouser quelqu’un d’une autre culture, d’une autre religion, d’une autre langue que la sienne est-il incohérent ? Un tel choix n’est-il pas en contradiction avec un passé familial et culturel ? Comment savoir ?
La réponse est claire : Vous, et vous seul, savez. Vous savez, quand bien même vous n’avez encore aucun élément pour prouver la cohérence de votre acte ou de votre ressenti. Écoutez votre voix profonde. Écoutez-la. Il ne s’agit pas simplement de « s’écouter », mais d’entendre la voix tapie au fond de soi, celle de l’instinct, celle d’une conviction profonde que rien n’étaye encore de façon visible. (…) »
Extrait d’Oser s’accomplir, 12 clés pour être soi de Marie-Pierre Dillenseger, Mama Éditions, 2019