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Quel avenir pour les enfants de l'Europe?

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Par Philippe Goy

Chez les petits enfants, il est un ensemble de qualités que l'on peut généralement observer : spontanéité, authenticité, curiosité, émerveillement, joie, énergie . qualités issues d'un état que l'on peut appeler « innocence ». L'être humain perd progressivement cette innocence avec les expériences de la vie et les blessures qu'elles engendrent, et il est malheureusement rare de rencontrer des adultes porteurs d'innocence dans la société actuelle, société qui semble tout faire pour empêcher cette vertu d'émerger.

L'innocence en danger

Partout dans le monde, à travers les attaques diverses que subissent les enfants, on constate que l'innocence est en danger. On peut évoquer le travail des enfants et les enfants-soldats qui sont des faits particulièrement choquants, mais qui ne semblent pas concerner les enfants d'Europe. Pourtant notre continent n'est pas épargné : pédophilie, pornographie, drogues sont des sujets récurrents dans nos médias.

D'autres attaques sont plus cachées, plus subtiles, comme l'abus d'utilisation de technologies « froides » (par exemple, dès le plus jeune âge : enseignement sur ordinateur ou jeux vidéo, qui coupent l'enfant des autres humains et de sa propre nature humaine) ou encore la publicité.

Le cas de la publicité

Un article du « Monde Diplomatique » de septembre 2004 développe ce sujet à travers l'expérience de la Suède.

Une des lois de ce pays, approuvée par 88% de la population, interdit les publicités télévisuelles à destination des enfants de moins de 12 ans, et toute publicité à destination des adultes ne peut précéder ou suivre une émission pour la jeunesse.

La Suède a proposé sa propre législation de « protection des jeunes contre les pressions commerciales » à l'Europe, peu avant sa présidence de l'union européenne en 2000.

Cette tentative a été repoussée par les autres pays, car la « marchandisation » du monde est la règle actuelle. La loi suédoise a même été contournée par les chaînes privées européennes, qui diffusent par satellite des émissions en Suède, en suédois, avec la pub habituelle qu'on peut trouver sur toutes les chaînes occidentales. N'étant pas basées en Suède, ces chaînes ont obtenu, au nom de la libre concurrence, le droit de ne pas être soumises aux lois « protectionnistes » de ce pays.

Cela montre que les jeunes représentent un enjeu très fort pour le monde industriel, que la publicité est un des éléments clés du système et montre aussi, accessoirement, les limites de la démocratie dans notre monde ultra-libéral où la loi commerciale prévaut sur la loi de l'état et sur la moralité.

Mais les Suédois n'exagèrent-ils pas à voir le mal partout, ne seraient-ils pas paranoïaques ? Le PDG de TF1 apporte des éléments de réponse. Extraits révélateurs d'une interview récente :

« .pour qu'un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c'est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer, entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible. A la base, le métier de TF1, c'est d'aider Coca-Cola, par exemple, à vendre son produit »

Voilà qui a le mérite d'être clair pour les plus naïfs d'entre-nous. Le but de la télévision est d'abrutir le téléspectateur afin de le préparer à recevoir sa dose de conditionnement publicitaire (ou politique) et d'en faire un parfait mouton-consommateur (ou électeur) décérébré. Avec des moyennes quotidiennes de plus de 3h30, le lavage de cerveau est conséquent. On lave plus noir que noir pour paraphraser un slogan à la mode chez les fabricants de lessive !

Cela est grave pour les adultes mais ce l'est d'autant plus pour les enfants. Plus l'être humain est jeune, moins son sens critique est développé, plus il est malléable, influençable, plus le message entre profondément en lui.

L'enfant-consommateur qu'on fabrique ainsi deviendra plus tard un adulte-consommateur, prêt à tout pour satisfaire ses désirs égoïstes sans cesse stimulés, et le monde continuera dans la voie de la marchandisation extrême et de l'immoralité.

Le modèle américain pour l'Europe ?

Cela ressemble fort à un déferlement de « l'Américan Way of Life » sur le monde. Lors de la campagne pour les élections américaines, le président G.W.Bush s'est défini comme le fervent défenseur du mode de vie américain, que le monde entier leur jalouserait (ce qui expliquerait le terrorisme. ). Il n'a pas complètement tort : nombreux sont ceux qui rêvent consciemment ou non, devant ce pays et ses contes de fées matérialistes (ils furent heureux et eurent un compte en banque bien rempli, une grosse voiture etc.).

Or l'Europe n'est pas l'Amérique. Même si nous vivons une époque de mondialisation qui conduit à une accélération des échanges, chacun a son histoire, sa culture, ses propres aspirations pour le futur.

Pour illustrer les particularités des deux continents, voici deux comparaisons.

Les drapeaux

Lorsqu'on observe le drapeau européen, il s'en dégage une harmonie, une unité : 12 étoiles formant le cercle de l'esprit. Ces étoiles peuvent évoquer les 12 signes du zodiaque représentatifs des différents archétypes d'êtres humains, mais aussi les différentes sensibilités nationales pouvant s'exprimer en un tout harmonieux (le cercle, le fond bleu uni).

Du drapeau américain, il se dégage plutôt une impression structurante, matérialisante : les étoiles sont alignées, rangées, comme les atomes de la matière. En positif, cela renvoie à leur grande maîtrise de la matière, à leur capacité à donner forme à leurs idées. En négatif il y a peut-être un risque d'emprisonner l'esprit (les étoiles) dans la matière, qui conduit alors à la dualité : les rayures blanches et rouges (le bien-le mal, avec nous-contre nous, aux antipodes de la diplomatie européenne.).

Les villes

Une autre image marquante est l'organisation des villes américaines, selon un quadrillage d'avenues rigoureux, une numérotation claire, avec un côté pratique/utile indéniable , à comparer avec les villes européennes et leurs rues-ruelles souvent tortueuses, aux noms parfois poétiques, où l'on se perd facilement, mais dont il se dégage un charme, une beauté.

Il existe donc des différences profondes entre l'Europe et l'Amérique qui peuvent se manifester dans de multiples domaines. Pourquoi nous, Européens, nous laissons-nous aller à la tentation de l'imitation, pourquoi renier notre « âme européenne » ? Sans doute par facilité, mais aussi par inconscience de notre vraie nature.

L'Européen...

Pour s'épanouir, l'Européen recherche avant tout (voir la Mission spirituelle de l'Europe ) les échanges, l'harmonie, ce qu'on peut appeler l'équilibre entre l'esprit et la matière, et qui se traduit par un intérêt pour les domaines culturel, juridique, guérison, économie fraternelle, science morale.

La position centrale de l'Europe entre l'Amérique/fief du matérialisme et l'Asie/berceau de la spiritualité, est significative de cette aspiration à trouver l'équilibre entre les extrêmes. Et pour trouver l'équilibre, il faut se positionner au centre. Chez l'être humain, le centre est le cour subtil. C'est en se concentrant profondément dans son cour, en y reliant aussi bien ses pensées que ses actions, que l'Européen deviendra lui-même et jouera son rôle.

Que trouve-t-on dans le cour ? Des trésors qui s'appellent, notamment, courage et innocence.

À ce sujet, il est intéressant de voir que ce sont les Européens du Nord (anciennement les Vikings) qui d'une part sont réputés pour avoir développé le courage les premiers, et qui d'autre part se préoccupent le plus aujourd'hui des enfants et du féminin comme le montrent leurs initiatives sociales (la loi « anti-pub » citée plus haut en est un exemple). Courage et innocence vont donc bien ensemble.

... et son avenir

Si nous restons symboliquement « les enfants de la pub », si nous ne nous remettons pas en cause, notre destin est tout tracé : notre seul idéal sera ce qu'on pourra alors appeler « l'Occidental Way of Life », celui du bonheur matérialiste, avec tous les problèmes que cela implique pour le futur de l'humanité et de la planète : destruction de la nature, abrutissement et esclavage des êtres humains, aussi bien ceux qui seront exploités que ceux qui accèderont à la fausse liberté de satisfaire tous leurs désirs.

Si nous cherchons à devenir « les enfants de l'Europe », si nous réveillons au centre de nous-mêmes nos aspirations les plus profondes et nos forces du cour, alors notre futur nous appartient. Nous guérirons individuellement de nos blessures, de nos conditionnements. Ces transformations individuelles permettront de générer un courant de guérison en Europe, qui pourra alors jouer son rôle d'harmonisation dans le monde. Elle montrera qu'il existe une alternative au modèle américain, alternative basée sur de belles vertus humaines dont la plus belle est peut-être l'innocence.

Philippe Goy - ex enfant de la pub, enfant de l'Europe en devenir