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Méditation, une alternative à la mondialisation libérale
Par Emmanuel Moulin
Le vingtième siècle a connu
deux grandes idéologies antagoniques, le libéralisme
et le communisme. Elles correspondent à deux formes
antagoniques d'organisation de la société et
notamment de la production. La première privilégie
la liberté d'entreprendre, d'investir et considère
donc le marché comme l'institution essentielle au bon
fonctionnement de la société alors que la seconde
s'y oppose et remplace le marché par l'Etat.
L'effondrement du bloc socialiste dès la fin des années
80 a suffi à certains pour proclamer le capitalisme
comme le meilleur des systèmes et comme le modèle
à suivre. Toutes les grandes institutions internationales,
avec le FMI (Fond monétaire internationale) en tête
proclament en effet haut et fort les bienfaits du libéralisme
et d'un développement axé sur les exportations.
Et pourtant, bien que nous avons atteint un niveau de développement
économique sans précédent, que la technologie
industrielle ne cesse de progresser et que les moyens de communication
sont de plus en plus sophistiqués, une crise multi
- dimensionnelle semble s'étendre à toutes les
sphères de la société.
Les sociétés capitalistes sont actuellement
en proie à de nombreuses contradictions :
1. Accroissement des inégalités mondiales : seulement 1 milliard d'habitants bénéficient du progrès (sur 6 milliards ! ) et les 3 personnes les plus riches au monde ont autant que les 8O pays les plus pauvres !
2. Des inégalités au sein même des pays avancés : comment justifier qu'un footballeur puisse gagner 2 millions de Francs par mois alors que 50 % des français gagnent seulement le SMIC ?
3. Augmentation des scandales politico-financiers : il n'y a pas un jour sans qu'une nouvelle " affaire " ne sorte !
4. Stress grandissant ; consommation accrue de psychotropes, violence au travail et nombreuses maladies psychosomatiques.
5. Dégradation de l'environnement local et planétaire : les scientifiques affirment que dans quelques années, nous ne serons pas loin du point de non-retour.
6. Développement de la violence urbaine : viols, meurtres, destructions matérielles.
7. Normalisation à l'échelle planétaire. Ecrasement des diversités culturelles.
8. Qualité de l'alimentation de plus en plus douteuse : vache folle, poulets aux hormones, OGM, affaire Coca-Cola etc
9. De nombreux conflits armés ont lieu dans le monde avec des armes souvent vendus par nos pays.
10. Détresse psychologique grandissante en chacun de nous : amertume, déception, résignation qui crée une véritable psychose
Liste non exhaustive malheureusement
Ces réalités dramatiques contredisent
avec les " bienfaits " dont parlent les défenseurs
du libéralisme.
Les auteurs socialistes en étaient déjà
conscients et c'est pourquoi ils ont cherché dès
le 19ème siècle à théoriser les
contradictions internes au capitalisme et à élaborer
un projet différent. Si la vision communiste ne semble
plus suivie aujourd'hui, il ne faut oublier qu'elle fut la
seule alternative pendant plus d'un siècle et c'est
pourquoi nous voudrions tenter d'expliquer en quoi une révolution
sociale ne résoudra jamais les problèmes que
nous connaissons dans nos sociétés capitalistes.
1- L'échec des révolutions politiques
Dans la pensée marxiste-léniniste,
le capitaliste est le " mal ". Leur solution est
simple: une révolution politique où l'Etat est
propriétaire des moyens de production.
Certains seront peut-être choqués par ce "
réductivisme " mais c'est pourtant pas bien plus
compliqué !
D'ailleurs, l'histoire nous montre aujourd'hui que les révolutions
socialistes en Russie, en Chine et à Cuba sont un échec
évident. En réalité toutes les révolutions
politiques et structurelles sont condamnées à
échouer. En effet toutes les révolutions sociales
sont violentes or, rien de bon ne peut être obtenu par
la violence.
L'exemple russe est riche d'enseignement puisqu'on a vu une
nouvelle classe se substituer aux capitalistes, celle des
bureaucrates et que le collectivisme a amené plus d'effets
négatifs que le capitalisme !
En fait, les problèmes de société sont
liés aux hommes et aux femmes qui la constituent. En
1917, les structures économiques et politiques ont
changé mais pas les gens eux-mêmes. Les mêmes
conditionnements, croyances, peurs et avidités pour
le pouvoir étaient présents. En fait, il apparaît
que quelque soit la structure, des relations de pouvoir et
d'exploitation se créent si l'homme ne change pas.
En fait, l'analyse marxiste est profondément matérialiste
comme l'analyse libérale. Selon K. Marx, l'homme n'a
pas de conscience individuelle ou d' âme. Marx cherchait
à présenter une critique articulée des
grandes religions organisées qui ont dominé
l'homme pendant des millénaires. Sur ce point, il a
certainement raison : " La religion est l'opium du peuple
" au sens où la religion maintient souvent l'homme
dans ses croyances et dans ses préjugés et l'empêchent
de comprendre les jeux de pouvoir et d'exploitation qui sont
en place dans la société.
Il est dommage que Marx n'est pas été conscient
de la différence entre les religions organisés
et la spiritualité, il aurait alors pu comprendre que
le problème n'est pas tant dans l'accumulation du capital
mais dans la psychologie et le mental de l'homme. La solution
ne peut venir que d'une révolution spirituelle.
Aujourd'hui, les auteurs marxistes- communistes
sont rares. On estime que 90 % des économistes et hommes
politiques actuels sont adeptes de la pensée libérale.
Tout le monde défend le libéralisme et le capitalisme
sauvage et semble impuissant devant sa force et ses effets
dévastateurs.
Comment expliquer que le capitalisme n'amène pas que
des cercles vertueux comme le suppose la théorie libérale
? Quelle alternative nous reste-il ? Quel défi devons
nous relever ?
2- L'idéologie libérale : un danger !
Si le communisme et la pensée marxiste
sont dangereux
il ne faut pas pour autant penser que
le capitalisme et la pensée libérale sont bien
meilleurs
nos sociétés capitalistes ne
se sont pas effondrées mais elles semblent pourrir
lentement, comme si leur succès était leur propre
échec !
Les économistes actuels (libéraux) ne peuvent
pas comprendre la situation actuelle et leur seule solution
est "encore plus de libéralisme" ce qui ne
fait en fait qu'accélérer la crise
Pour expliquer l'inaptitude des auteurs libéraux à
expliquer les effets destructeurs du capitalisme actuel, il
nous faut approfondir les prémisses de la théorie
économique libérale :
La théorie libérale repose sur l'hypothèse
centrale de l'existence de l'homo economicus ou agent rationnel.
Si on se penche sur la partie psychologique de l'homo economicus,
on s'aperçoit que l'individu est chez les libéraux
un individu-ego, dont les caractéristiques sont de
chercher son intérêt, d'avoir des besoins illimités
et d'être indépendant de la nature.
L'économiste hétérodoxe A. Hirschman
explique bien cela dans son ouvrage Vers une economie politique
élargie que " l'action motivée par l'intérêt
semble être caractérisé par deux éléments
essentiels : l'égocentrisme et en second lieu le calcul
rationnel "
Or mettre un individu ego à la base d'une théorie
sociale, c'est créer une société de compétition,
de violence et de malaise !
L'individu n'est pas seulement un calculateur, il est aussi
un être sensible qui possède des qualités
de générosité, d'amour et de compassion
et qui sait qu 'il appartient à la nature. L'être
humain n'a pas que des préoccupations matérielles
il
vit, il danse, il pleure, il aime, il se recueille. Malheureusement,
les économistes et les hommes politiques ont peu de
connaissance en psychologie ou en spiritualité et pas
suffisamment de bon sens pour pouvoir se rendre compte qu'il
est dangereux de considérer l'homme uniquement sous
l'angle de la rationalité économique. La question
n'est pas de nier l'utilité du marché et de
la dynamique capitaliste mais de comprendre que l'homme est
matériel mais aussi spirituel.
Depuis son apparition, le capitalisme n'a cessé de
détruire les bases morales et culturelles empêchant
la libre entreprise et le commerce. C'est ainsi que les rois
nous ont quitté mais aussi des choses plus précieuses
telles que des espèces animales ou végétales
etc.
Le capitalisme en est aujourd'hui à l'échelle
planétaire et sa mondialisation ne se fera pas sans
de nombreuses transformations. C'est bien sûr une étape
importante dans l'histoire de l'humanité car elle permet
une amélioration du bien-être matériel
sans précédent et un rapprochement des peuples
grâce aux nouvelles technologies et moyens de communication.
Mais, inversement, la période actuelle peut être
extrêmement dangereuse si le niveau de conscience des
hommes et des femmes de cette planète n'évolue
pas ! Et, le danger n'est pas dans un futur lointain, ni dans
un futur proche
il est là. La société
actuelle fait déjà face à un vide spirituel
qui se paye très cher et par une violence de plus en
plus banalisée. La mondialisation libérale est
en train d'accroître les inégalités entre
le Nord et le Sud et à l'intérieur même
des pays occidentaux
le monde devient une marchandise
les
exemples sont nombreux et souvent terribles pour des centaines
de millions de personnes et pour l'écologie de la planète.
Il est impératif que nous intégrions une démarche spirituelle pour balancer le matérialisme ambiant mais cela ne peut se faire que si nous prenons déjà conscience de notre identification avec le système capitaliste et ses idéologies.
3- La révolution silencieuse
L'alternative
au capitalisme mondial n'est certainement pas une révolution
politique ni d'ailleurs un replis nationaliste comme certains
pourraient être tentés de le croire
le libéralisme
dans les échanges est nécessaire et souhaitable
et le 21ème siècle nous aura au moins appris
cela mais pour éviter d'aller dans les travers du capitalisme
et de ses idéologies, il est urgent d'intégrer
au matérialisme son équivalent spirituel !
Qu'on me comprenne bien
ce n'est pas le capitalisme comme
mode d'organisation qui est en jeu mais l'idéologie
capitaliste, cette religion du dollar, cette constante recherche
du profit jusqu'à même écraser les autres
ou à détruire la nature !
Nous ne devons pas oublier que le bonheur est autre chose
que l'accumulation de la richesse
il se trouve dans un
bien-être intérieur qui n'est possible que dans
une conscience de notre interdépendance avec les autres
et avec la nature, au delà des idéologies et
des conditionnements sociaux
or, il est évident
que l'homme fait aujourd'hui face à un véritable
vide spirituel !
Les publicités et les médias nous font croire
que le bonheur c'est plus de consommation... non, l'aisance
matérielle est un grand progrès mais elle reste
encore très loin des besoins plus évolués
que sont l'amour, la joie, la simplicité et tous les
besoins d'ordre plus spirituel !
La
méditation et l'ouverture du cur sont les seules
manières de nourrir ces besoins spirituels
et
personne ne pourra jamais les acheter ou les vendre car ils
sont intérieurs et individuels. Chacun doit faire sa
propre démarche pour trouver sa connexion avec son
être intérieur; personne ne peut le faire pour
nous !
Je pense même qu'il faudrait intégrer la méditation
à tous les cursus universitaires et développer
des centres de méditation où les gens pourraient
expérimenter l'espace du silence
car l'homme moderne
doit impérativement être éduqué
spirituellement pour balancer son rationalisme et ses avancées
technologiques.
Et quand je parle de spiritualité, je ne pense pas
à une religion ou à un quelconque maître
spirituel, je pense à une véritable science
de l'intérieure dans laquelle les valeurs essentielles
comme la méditation, le dé-conditionnement,
la compréhension du fonctionnement de l'ego, le travail
sur les peurs, la découverte des énergies subtiles,
la compassion et l'humilité sont développés.
Heureusement, cette réalité spirituelle existe déjà (dans certains pays plus qu'en France d'ailleurs), elle n'est pas organisée et c'est pourquoi elle est si vivante c'est une nébuleuse qui va du bouddhisme, au zen, à tous les grands maîtres spirituels contemporains en passant par tous les stages de développement personnel et de croissance spirituelle. C'est une véritable révolution silencieuse
Emmanuel Moulin