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Les vertus du rire
Oui, rire c'est bon !
La réforme de l'assurance-maladie est l'un des chantiers prioritaires de l'année qui débute, au moment où va s'engager le grand débat sur son financement, les périodiques s'interrogent sur l'avenir de notre système de santé : 60 millions de consommateurs (n° 376, octobre 2003, p. 34-43) publie les résultats d'un sondage exclusif sur ce que savent les Français de leur système de santé. On découvre que 94% de nos concitoyens ignorent ou
sous-estiment le montant de leurs dépenses de santé. L'enquête a été menée par téléphone auprès de mille dix personnes de plus de dix huit ans, représentatives de la population française, interrogées selon la méthode des quotas (sexe, âge, profession et catégorie socioprofessionnelle, type de commune et région), entre le 10 et le 19 juillet.
Quoi qu'on dise, la réforme est en route. Le transfert d'une partie des dépenses (vers les mutuelles, les assurances et les usagers) est inévitable. La brèche est ouverte. Il faut freiner les coûts. Le remboursement de certains médicaments est sur la sellette, faut-il s'en étonner ?
Santé magazine, dans son n° 33, octobre 1003, p. 96-97, fait état des doutes portant sur l'efficacité des traitements homéopathiques fréquemment utilisés pour la prévention des petits maux de l'hiver (rhinopharyngite, infection ORL) ; pour le soin des maladies infantiles (oreillons, rougeole, rubéole, varicelle, troubles du sommeil) ou pour faire face aux problèmes de peau (urticaire, verrues, réactions pubertaires, etc.). Administrées sous forme de sirop, de gélules-fondant-sous-la-langue, ces médications en minidose s'avèrent coûteuses et d'une efficacité souvent douteuse.
Il y a un médicament dont on ne parle guère, c'est le rire. Oui, le rire est bon pour la santé ! Celui qui rit introduit de la joie dans sa vie. Rire, c'est de faire du bien au niveau corporel comme au niveau moral. « Une minute de rire équivaudrait à quarante-cinq minutes de relaxation. »
Si l'on se reporte aux dires de Santé magazine, médecins et psychothérapeutes seraient de plus en plus nombreux à croire aux vertus de la « rirothérapie ». Ils concèdent toutefois que le rire ne modifie pas directement l'état morphologique, ni la physiologie des gens, mais il changerait le regard qu'on jette sur soi-même et il introduirait une distance entre le moi et le ressenti. Bref, le rire agirait comme un antidote ou un agent anti-stress réduisant le négatif qui vous perturbe et accentue votre sentiment de souffrance.
Outre qu'il détourne l'attention portée à la douleur, il vous transforme intérieurement dans un sens positif, en multipliant les échanges respiratoires, en renforçant les défenses immunitaires, en favorisant notamment la production d'immunoglobuline A dans les glandes salivaires et en vous apaisant par l'augmentation de la production d'endomorphine, facteur antidouleur, générateur d'un sentiment de bien-être.
Déjà, en août 1988 (n° 152, p. 60-64), Santé magazine s'était intéressé au rire, mais plutôt sous son aspect psychosocial. « Le rire, lisait-on, c'est contagieux. Quand quelqu'un commence à avoir le fou-rire, c'est la vague déferlante : tout le monde suit. » Cette contagion est excellente sous tous les rapports : « Riez ! Faites rire ! Vous ferez une bonne action », concluait le Dr H. Rubenstein, consultant médical (p. 60).
Le mécanisme du rire est complexe. Il met tout le corps en action. La zone du rire dans le cerveau se situerait dans l'hémisphère droit, c'est-à-dire là où siège le contrôle de la personnalité. En se prolongeant, le rire donne une impression de bien-être et l'on se sent sur-le-champ totalement relaxé.
Pour conserver une bonne santé, le rire semble donc indispensable (surtout pour les personnes sédentaires, étrangères aux activités physiques).
Le rire, en conclusion, stimule et régularise les fonctions respiratoires et cardio-vasculaires.
Le Dr Henri Rubenstein va jusqu'à y voir un authentique facteur de longévité.
Ce qui est certain, en tout cas, c'est qu'il est entré aujourd'hui dans la panoplie des médecins hospitalières et pas seulement en pédiatrie.
Dans les publications (comme, par exemple, Croix magazine Nord-Pas-de-Calais, n° 1107, 10-26 janvier 1990), on a pu lire des reportages sur l'utilisation thérapeutique du rire dans des cliniques et des établissements médicaux des plus sérieux. Le rire, en ces temps de morosité, est devenu une denrée rare, mais sachez qu'il y a des rires qui sauvent, qui font briller les yeux, éclairent des visages et restaurent, chez des gens qui souffrent ou qui doutent, la confiance et l'équilibre.
Mais restons vigilants : tous les rires sont-ils de cette nature ? Le Pr Carlston Nimitz, de l'université de Berlin, a disséqué méthodiquement le rire à l'aide d'une caméra-vidéo et d'un ordinateur (voir L'Express, 14-16 novembre 1986, p. 74 s.). Quatre-vingts personnes ont avec lui jugé le rire de dix-huit individus filmés par surprise. Ainsi fut mise en évidence l'importance relationnelle du rire.
En fermant les yeux, en changeant la direction du regard, le rieur rentre en lui-même, il exclut l'autre ou s'exclut lui-même, c'est un « retour à la source ».
Naturellement, le discernement s'impose. Il y a rire et rire : il y a des rires qui déconnectent, mais il y a aussi des rires qui soudent, des rires partagés, qui ouvrent à l'autre. Il y a des rires qui blessent, qui sont des armes, qu'on redoute, et il y a des rires qui désarment, qui délivrent, qui rassurent, des « rires fusionnels ».
Georges Minois a écrit Histoire du rire et de la dérision (Paris, Éd. Fayard, 2000). On y découvre l'extrême diversité des rires (dont Aristote faisait le propre de l'homme et dont Freud, en distinguant le rire de la peur et le rire du plaisir faisait la « manifestation du défi », dont le but latent serait de limiter une excessive dépense de ses affects.
Quoi qu'il en soit, riez ! le rire fait vivre, le rire est décapant ! Il régénère ! Comme l'écrivait Catherine Dolto, éminente psychanalyste, n'oubliez jamais qu'un clown sommeille en chaque être humain ! L'expérience démontre qu'il peut être astucieux de l'interpeller.
Esprit et Vie n°98 - janvier 2004 - 2e quinzaine, p. 36-37.
P. Louis Debarge